mercredi 5 décembre 2007

D'où viennent nos problèmes



Jadis…

Dans les années ’50, le maire Drapeau avait un rêve : une île, une ville… et un maire! Seize ans après son retrait de la vie politique et trois ans après sa mort, le Parti québécois au pouvoir réalisait son rêve.

Les fusions

À la fin des années ’90, le gouvernement du Parti québécois décide de remodeler la carte géopolitique de l’île de Montréal. Après avoir jonglé avec toutes sortes de scénarios (une île, trois villes; une île, cinq villes; etc.) le gouvernement adopte, le 20 décembre 2000, la «Loi portant réforme de l’organisation territoriale municipale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l’Outaouais». Cette Loi édicte que le 1er janvier 2002, l’ensemble des 29 municipalités de l’île de Montréal ne formeront qu’une seule ville. Ce fut une fusion «forcée» dans le sens où les citoyens ne furent jamais consultés sur ce changement majeur.

Les arrondissements

Ce faisant, la Loi créait des administrations locales intermédiaires, soit 29 arrondissements ( dont 9 sur le territoire de l’ancienne Ville de Montréal), avec, chacun, un conseil d’arrondissement et un président. Les arrondissements obtenaient juridiction, entre autres, sur la culture (les bibliothèques et les Maisons de la culture). De plus, selon la Loi, le conseil d’arrondissement «peut négocier et agréer les stipulations d’une convention collective» portant sur quatre matières : le travail supplémentaire, l’horaire de travail, les vacances annuelles et les congés fériés et mobiles.

Une nouvelle Loi : un gros problème!

Les choses en étaient là lorsque, le 14 avril 2003, le Parti libéral du Québec fut porté au pouvoir. Tous se souviennent que Charest avait fait de la possibilité de «défusion» un de ses principaux cheval de bataille. Il tînt promesse.

Afin d’inciter les anciennes municipalités à rester «fusionnées», le gouvernement adopte une «Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal», le 18 décembre 2003. Les cadeaux que la Loi octroyait aux arrondissements, dont les anciennes banlieues, étaient nombreux : leur président devenait un maire avec les pouvoirs d’un maire, et ils avaient le pouvoir de «négocier et d’agréer» sur dix-sept matières (et non plus seulement quatre) dont : les comités de relations de travail, le comblement des postes, la mobilité de la main-d’oeuvre, le travail à forfait, les mesures disciplinaires, l’engagement et le congédiement des employés, la création et l’octroi des postes de cadres de l’arrondissement, etc.

Les «défusions»

Les référendums sur les «défusions» eurent lieu le 20 juin 2004 : malgré les cadeaux de la Loi de 2003, quinze anciennes banlieues ont voté pour redevenir autonomes. Maintenant, c’est une île, seize villes et c’est un Montréal, dix-neuf arrondissements…

L’érection en fiefs

Après les «défusions», la Loi de 2003 est demeurée en vigueur. Les arrondissements, et plus particulièrement les neuf arrondissements de l’ancienne Ville de Montréal, ont compris tout le parti qu’ils pouvaient tirer de leurs pouvoirs.

Et c’est à ce moment que le foutoir s’est installé car les arrondissements se sont érigés en autant de fiefs et depuis, chaque petit maire, avec l’aide de son conseil d’arrondissement, dirige sans partage au gré de ses caprices et de ses ambitions.

«La création d’arrondissements devait rapprocher la politique municipale du citoyen montréalais, mais c’est le contraire qui s’est produit : chaque maire gère pratiquement comme bon lui semble et les dérives des derniers mois, à Outremont ou ailleurs, ont démontré les lacunes de ce nouveau mode de fonctionnement. Il est temps d’apporter des corrections.»
Montréal, revu et corrigé, éditorial de Nathalie Collard, La Presse, 5 novembre 2007.

Un bon exemple de cela est le sort que l’on réserve aux travailleuses et travailleurs auxiliaires des bibliothèques (et, par ricochet, aux permanents).

L’enjeu : la mobilité

Les auxiliaires ont encore ce que les permanents ont perdu lors de la signature de la dernière convention collective : la mobilité-Ville. C’est l’entente E.V. 96-94 qui l’assure, entre autres par l’existence de la Banque réseau. Comme on le sait, l’entente E.V. 96-94 est toujours en vigueur et le sera tant et aussi longtemps qu’une autre entente ne l’abrogera pas.

Une brèche importante

Les arrondissements, désirant mettre fin à la mobilité-Ville des auxiliaires afin de mieux les contrôler à l’intérieur de leurs frontières, passent à l’attaque en 2006. L’arrondissement Mercier / Hochelaga-Maisonneuve convoque le syndicat pour renégocier l’entente E.V.96-94. Après une série de rencontres, l’arrondissement demande au gouvernement l’intervention d’un médiateur, ce que le gouvernement lui accorde. Afin d’acheter du temps, nous dit-on, notre syndicat signe, en juillet 2007, une «entente intérimaire», valable uniquement dans l’arrondissement de juillet à décembre 2007, entente ouvrant une brèche importante : dorénavant, il y aura dans cet arrondissement une petite banque réseau d’arrondissement. C’est l’introduction de la notion d’arrondissement qui pourrait signifier le début du casernement. C’est aussi l’émergence de la possibilité d’une coexistence de plusieurs ententes : une par arrondissement, pourquoi pas…

Les arrondissements tuent la Banque réseau

Par ailleurs, la Banque réseau de l’entente E.V.96-94 existe toujours. Mais la Loi de 2003 nous mène dans un cul-de-sac : car si c’est à la Ville de gérer la Banque réseau, c’est aux arrondissements qu’il revient, selon elle, de la financer, puisque la mobilité est maintenant de leur ressort. Or, les arrondissements, justement parce que la mobilité est de leur ressort, refusent de financer une Banque réseau gérée par la Ville, d’autant plus que celle-ci les prive d’une emprise totale sur LEURS travailleuses et travailleurs ! On en est là!

Il est temps que l’on se mette à jouer

Le but de cet historique n’est pas de décourager qui que ce soit, bien au contraire. C’est la connaissance des faits, des forces en présence et des enjeux qui permet de développer des tactiques et des stratégies valables et efficaces afin d’atteindre notre objectif : la préservation de notre mobilité-Ville et de notre ancienneté-Ville.

L’enjeu est important, sinon crucial. Et il n’y a pas que les auxiliaires des bibliothèques qui sont concernés, comme on pourrait le croire de prime abord. Une des priorités prioritaires de notre syndicat au cours de la présente négociation de notre convention collective est d’obtenir la mobilité-Ville pour les permanents qui sont casernés en arrondissement. Si les arrondissements obtiennent le casernement des auxiliaires des bibliothèques, que croyez-vous qu’il adviendra de la mobilité des permanents?
Il est vraiment temps que l’on se mette à jouer!

lundi 19 novembre 2007

Commentaires



L'équipage du Colvert a décidé de laisser sur le Blog les commentaires qui ont été ajoutés aux articles des mois de septembre et d'octobre. Soit celui (ceux? moins probable) qui les a écrit ne sait pas lire, soit il a échoué son cours de compréhension de texte. Leur teneur ne sert qu'à démontrer à quel point il est difficile et peut-être dangereux de tenter d'établir un débat sain et démocratique lorsque, pendant des années, on s'est contenté de n'être qu'à la remorque de ce que l'on veut bien nous dire sans jamais regarder et questionner la réalité qui nous entoure.
Désolé pour lui, nous ne sommes pas des béni-oui-oui.

Nous ne sommes pas là pour nous engager dans une polémique aussi stérile que vaine. Si certains se sentent menacé et ne savent répondre que par l'invective, le derviche (qui ne sera jamais un imam) lui dit: "Les chiens aboient, la caravane passe."

mardi 9 octobre 2007

Un droit acquis


Lors de l’implantation du logiciel «Millemium» en juin 2007, les responsables se sont empressés de nous enlever la prérogative suivante : lorsque nous empruntions des livres, si nous étions en retard, nous ne payions pas d’amende du simple fait d’être un employé de la Ville de Montréal (code 243). Cette prérogative était-elle un droit acquis ou un privilège? Parce que si c’était un privilège, l’employeur peut l’abolir lorsqu’il le désire; mais si c’était un droit acquis, il ne peut l’abolir unilatéralement : c’est l’équivalent d’une clause de la convention collective.

Afin de répondre à cette question, il convient de se demander ce qu’est un droit acquis. D’entrée de jeu, un droit acquis est une notion jurisprudentielle, c’est-à-dire que ce droit a été élaboré par les juges et s’est développé au fur et à mesure qu’ils rendaient des jugements.

Grosso modo, selon les auteurs consultés récemment (juges et spécialistes du droit du travail), un droit acquis provient d’une pratique constante, généralisée et consciente de la part des parties pendant une période significative.

Maintenant, appliquons les critères du «droit acquis» au non-paiement des amendes pour retard :

· une pratique constante : lorsque la pratique du non-paiement d’amendes pour retard fut établie, elle fut appliquée de manière constante c’est-à-dire en tout temps (sans qu’il n’y ait de moments où elle n’était pas appliquée);

· une pratique généralisée : tous les employéEs de la Ville travaillant dans les bibliothèques détenaient cette prérogative, même qu’ils avaient toutes et tous un code spécial (243) qui amnistiait automatiquement les amendes;

· une pratique consciente : non seulement l’employeur nous donnait-il ce code spécial (243) mais encore, pour une très grande majorité d’entre nous, on nous l’expliquait lors des formations données par l’employeur;

· pendant une période significative : le non-paiement d’amendes pour retard remonte à au moins, sinon avant, l’implantation du logiciel Merlin, quelque part en 1992, c’est-à-dire pendant au moins 15 ans.

Nous sommes donc en mesure de dire que le non-paiement d’amendes pour retard est un droit acquis, selon les critères de la jurisprudence.

Pourtant, bien que fréquemment soulevé auprès des dirigeantEs de notre syndicat, il ne semble pas, à notre connaissance, qu’il y ait volonté de lever un grief à ce propos. Un détail me direz-vous… Un détail qui modifie nos conditions de travail. Et l’employeur accumule ce genre de détails parce qu’il sait, lui, qu’une accumulation de grains de sable forme un désert… La preuve : si ce n’était qu’un détail, pourquoi l’employeur l’a-t-il aboli unilatéralement?

Serions-nous des gras durs


Il est fréquent d’entendre dire, même de la part de certains de nos collègues, que les fonctionnaires municipaux sont trop payés et que, à cause de cela, la Ville de Montréal est en constante difficulté financière. Ne reculant devant rien, le Colvert est allé enquêter et a déniché les chiffres suivants (tous ces chiffres sont officiels!) :

· entre 2001 et 2006, à Montréal selon Statistique Canada, le coût de la vie a augmenté de 10,8 %;

· entre 2001 et 2006, c’est-à-dire la période de notre dernière convention collective, nos salaires ont augmenté de 9,3 %. Nous avons donc perdu 1,5 % de pouvoir d'achat en seulement 6 ans, ce qui signifie que si nous voulions conserver notre pouvoir d’achat de 2001, il faudrait, en 2006, travailler 31 minutes 30 secondes de plus que le «35 heures» hebdomadaire;

· entre 2001 et 2006, les revenus de la Ville de Montréal ont augmenté d’environ 17,5 %! Eh oui, 17,5 %!Et, en 2007, il est prévu dans le budget de la Ville de Montréal que ses revenus augmenteront encore d’environ 2,5 %!

Les augmentations de salaire des éluEs (de 20 % dans certains cas…), la création de très nombreux nouveaux postes de cadre, la re-localisation de bureaux d’arrondissements (environ 20 Millions $ à Ahuntsic / Cartierville), les coûts générés par la division de Montréal en fiefs, etc., etc., etc., ne relève ni de notre pouvoir, ni de notre volonté. Mais, à regarder les chiffres, il semble que nous en ferions les frais!

Dans cette perspective, notre revendication salariale de l’indice du coût de la vie + 1 % semble assez timide, n’est-ce pas? Peut-être aurions-nous dû ajouter à nos revendications : une saine gestion des avoirs des Montréalais?

lundi 1 octobre 2007

Le derviche et l'éléphant du roi (ou retour à la case départ 2)


Le roi avait un éléphant qu'il aimait beaucoup.Il le laissait libre de courir où il voulait, et cet éléphant saccageait sans vergogne les plantations des paysans. Ceux-ci étaient excédés, mais n'osaient pas se plaindre.

Un jour, pourtant, ils allèrent trouver un derviche respecté pour sa sagesse :

-Toi qui sais parler, lui dirent-ils, aide-nous ! Va supplier le roi d'attacher son éléphant qui détruit nos récoltes.

Le derviche réfléchit. Ce qu'on lui demandait n'était pas chose facile. Le roi n'avait pas bon caractère et une telle requête risquait de le mettre en colère. Pourtant, finalement, il accepta :

- D'accord ! Je parlerai pour vous, mais vous viendrez avec moi et me soutiendrez.
-Bien sûr, nous viendrons avec toi pour te soutenir !

Le lendemain, il se présenta devant le roi, accompagné de sa délégation.

- Qu'as-tu à me dire ? demanda le roi.
- Ton éléphant se promène partout, dans les champs et le vergers...
- Et alors ? tonna le roi.

Le derviche se retourna vers la délégation pour chercher un soutien, mais tous les paysans terrorisés baissaient la tête.

- Alors ? cria le roi.
- Alors... nous avons pensé que le pauvre doit s'ennuyer tout seul. On s'est dit qu'il faudrait lui trouver un éléphante pour l'accompagner dans ses promenades.
- Excellente idée, tu es un sage ! Excellente idée ! Dès demain, je réparerai cet oubli et je ferai venir une éléphante !

(D'après la tradition arabe, Les Philo-fables pour vivre ensemble, M. Piquemal et P. Lagautrière, Albin Michel, 2007)




lundi 24 septembre 2007

Retour à la case départ


Des fois, il faut retourner à la base des choses.


Un syndicat, c’est un regroupement de travailleuses et de travailleurs qui a pour but de défendre les intérêts des travailleurs et d’améliorer leurs conditions de travail.
Quelle que soit la structure syndicale, elle ne devrait avoir d’autre but que d’assurer le processus démocratique et de susciter la solidarité par la formation, l’information et l’action.

Le «Manuel du délégué syndical, de la déléguée syndicale» de la FTQ, celui qui sert de base à la formation des délégués syndicaux de notre syndicat local, dit ceci :
· «Les fondements du syndicalisme reposent depuis toujours sur deux grands principes de la démocratie : le droit de chaque membre d’exprimer librement son opinion; le respect des décisions de la majorité, par la minorité.»
· «(…) un syndicat qui assume ses responsabilités et son rôle est un syndicat qui cherche continuellement à communiquer avec ses membres et à les écouter pour être en mesure de les représenter adéquatement auprès des employeurs.»

Cela étant, les membres d’un syndicat ont le choix :
· ou bien considérer que le syndicat est quelque chose qui leur est étranger et ne pas s’en occuper (ainsi, quand on dit qu’on ne peut rien faire et qu’on ne fait rien, c’est vrai que rien ne change et on a raison : c’est une tautologie!);
· ou bien considérer que le syndicat leur appartient et se l’approprier.

Dans tous les cas qui nous préoccupent (par exemple, la «lettre d’entente intérimaire» de Mercier / Hochelaga / Maisonneuve, l’équité salariale, la négociation de la convention collective, etc.), les membres peuvent agir de toutes sortes de façon, telles :
· discuter avec leur déléguéE syndicalE pour lui donner son opinion;
· écrire à leur exécutif syndical;
· se réunir et discuter pour agir;
· se rendre aux réunions (comme les Assemblées générales) et parler de leurs préoccupations, leurs intérêts, leurs problèmes, etc. Exiger des réunions, s’il le faut;
· etc. (il suffit d’y penser et d’en parler…)

Quand on ne s’occupe pas des choses, les choses s’occupent de nous.
Alors, soit on grogne tout seul dans son coin (derrière une étagère…) ou bien on prend les choses en mains?

lundi 17 septembre 2007

Fatalité et résignation


La fatalité, c’est quelque chose d’inéluctable. La résignation, c’est une attitude devant les évènements de la vie, une attitude de soumission.

Par exemple, tentons un petit jeu de rôle.

Vous êtes le maire de Montréal et vous avez un syndicat de fonctionnaires «col blanc» devant vous. Il y a de quoi avoir peur de cette force potentielle : entre 7 000 et 9 000 travailleuses et travailleurs qui peuvent bloquer toute l’administration municipale (la perception des taxes, les finances, l’administration de la Cour municipale, l’inspection des bâtiments, Accès-Montréal, le 9-1-1, la gestion des sports, des loisirs et de la culture, le stationnement, etc.). Même l’émission de votre chèque de paye de maire deviendrait problématique. Cela pourrait être catastrophique… Alors vous vous dites : "je vais négocier en tentant de sauver les meubles".

Puis, vous vous penchez sur l’histoire de ce syndicat «col blanc». Vous vous rendez compte qu’en plus de 25 ans, lors des négociations, ce syndicat n’a pratiquement jamais fait de moyens de pression et ne compte aucune journée de grève. Vous savez aussi (parce que vous le savez…) que lors de leurs assemblées générales, il ne rassemble qu’environ 2 % des membres : aucune mobilisation.

Alors, comme on dit au hockey, vous venez de grandir de deux pieds et, gentleman, vous offrez une augmentation salariale de… 0 %! Et vous vous dites que ces fonctionnaires devraient se compter chanceux que vous ne diminuiez pas leurs salaires.

Il y a un dicton au baseball qui soutient que «good guys never win»! (Les bons gars ne gagnent jamais)

Maintenant, disons que vous êtes un maire d’arrondissement. Vous voulez vous bâtir un fief à toute épreuve et régner en roi et maître. Mais il y a ce syndicat… Vous aussi, vous savez que ce syndicat n’est pas, pour utiliser un euphémisme, très militant. Alors, vous faites un premier test.

Même si la loi dit que le seul pouvoir que vous avez, en tant qu’arrondissement, est celui de négocier (pas d’imposer!), vous imposez quand même, sans avertir le syndicat, une petite augmentation d’heures d’ouverture publique dans les bibliothèques. Personne ne bronche. Bien sûr, le syndicat aurait pu tenter de négocier ne serait-ce qu’une augmentation du nombre de permanents, mais il ne fait rien. En tant que maire, vous vous dites que ça confirme que vous avez tous les pouvoirs. Alors pourquoi pas une deuxième augmentation unilatérale d’heures d’ouverture publique,puis une troisième et une quatrième… Vous le faites et… personne ne bronche. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes même si le nombre d’heures de travail fait par les auxiliaires est passé d’environ 45 % à environ 60 %!

Alors, vous décidez que la Banque réseau nuit à l’exercice de votre pouvoir puisqu’elle permet une certaine liberté à «vos» travailleuses et travailleurs : ils peuvent aller voir ailleurs et même – oh horreur! – changer de port d’attache. En bon «freak control», vous voulez faire sauter la Banque réseau. Cependant, dans un geste de grande mansuétude, vous convoquez le syndicat pour négocier. Il se rebelle un peu et, à votre grande surprise… le syndicat signe un texte que vous avez vous-même écrit et qui vous donne une juridiction d’arrondissement sur les auxiliaires. Ces derniers sont maintenant pris dans un tout petit enclos et ne pourront, dans la pratique, presque pas en sortir. Ils sont piégés et dépendants de vous.

En tant que dirigeant de l’arrondissement, vous vous dites pourquoi s’arrêter en si bon chemin? Comme un enfant, vous voulez connaître les limites… vous voulez surtout savoir s’il y a des limites. Ainsi, vous commencez à faire des remplacements en déplaçant, la journée même, des auxiliaires d’une bibliothèque à l’autre de votre arrondissement. Personne ne bronche, tout va bien. Vous décidez de pousser un peu plus : vous refusez un congé selon la loi 128 demandé un mois d’avance sous prétexte que vous ne pourrez pas remplacer le travailleur (même si vous avez obtenu la gestion d’une «banque réseau d’arrondissement», même si vous déplacez les gens d’une bibliothèque à l’autre, même si il reste un mois pour combler le congé, etc.). Personne ne bronche, tout va plus que bien.

«Good guys never win!»

Et les syndiquéEs auxiliaires, dans tout ça? Malgré certaines augmentations de salaire, ils ont perdu énormément de pouvoir d’achat ces dernières années, ils s’appauvrissent. Leur charge de travail augmente sans cesse. Ils deviennent de plus en plus des travailleurs spécialisés utilisant une technologie en évolution et assume de plus en plus de responsabilités sans compensation ni reconnaissance. Ils utilisent une deuxième langue sans prime (tous les fonctionnaires bilingues de tous les gouvernements ont une prime au bilinguisme). Ils se font refuser des congés auxquels ils ont droit. Ils vont devenir membres d’équipes volantes. Ils travaillent soirs et fins de semaine sans compensation. Celles et ceux qui travaillent 5 jours / semaine n’ont que très rarement la chance d’avoir deux jours de congé consécutifs (sauf dans le cas de postes corpo), etc. Et, la cerise sur le gâteau, ils ne voient pas la possibilité, avant de très nombreuses années, de devenir permanents.

Pourtant la Ville et les arrondissements ont de l’argent et même beaucoup. Les éluEs se votent des augmentations de salaire (20% dans certains cas), ils aménagent des bureaux d’arrondissement au coût de 20 millions, ils engagent des cadres à tel point qu’il devient difficile de les compter et de savoir qui est responsable de quoi…

Et les syndiquéEs auxiliaires, dans tout ça? Ils grognent bien un peu dans leur coin, surtout quand ils sont seuls derrière une étagère, mais ils ne vont pas plus loin et ils continuent de travailler avec le sourire. Cette attitude permet à nos patrons de penser que le syndicat n’est qu’une addition d’individus serviles qui ne sont pas solidaires. Quant aux dirigeants du syndicat, ils sont en mesure de penser la même chose puisque lorsque, par exemple, ils signent une lettre d’entente qui va à l’encontre des intérêts et de la volonté unanime des syndiqués (pourquoi d’ailleurs ont-ils fait ça???), personne ne bronche et personne ne vient les remettre à leur place, c’est-à-dire leur rappeler qu’ils devraient agir comme des porte-parole des syndiquéEs et non pas comme un deuxième patron.

Il y aurait amplement de quoi monter aux barricades! Mais ce qu’il faut retenir, c’est que ce qui se passe ne découle pas d’une fatalité mais d’un laisser-faire.

Sommes-nous résignés?

Dans ce syndicat, comme dans tous les syndicats, le pouvoir appartient aux membres, quoique certains voudraient faire croire le contraire. Évidemment, si les membres n’utilisent pas leur pouvoir, ce pouvoir s’atrophie, comme tous les organes qui ne sont pas utilisés, il s’atrophie jusqu’à disparaître. Et ce qui se passe devient ce qu’on s’imagine être une fatalité pour laquelle on doit se résigner. Quand on laisse aux autres le pouvoir sur nos conditions de travail et de vie, il ne sert à rien de grogner dans son coin : cela n’aura aucun impact.

Que diriez-vous de se tenir debout ensemble plutôt que d’être individuellement résignés et à genoux?

Comme disait Garfield : «Vieillir est une fatalité, grandir est un choix.»

samedi 8 septembre 2007

La main gauche et la main droite


Depuis que l'ancienne Ville de Montréal a volé en éclat pour devenir un ensemble de fiefs (que l'on nomme pudiquement arrondissements), les fonctionnaires permanents se retrouvent assujettis et pratiquement ligotés au nouveau territoire où ils travaillent. Il est pratiquement impossible pour eux d'entrevoir l'ombre de la possibilité d'un quelconque mouvement vers un autre endroit de ce qui fut une ville. Cette situation fut définitivement coulée dans le béton lorsque le Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montréal (SFMM) signa une lettre d'entente qui modifiait radicalement l'article 19 portant sur le comblement de poste.

Pour nous, fonctionnaires auxiliaires travaillant dans les bibliothèques de l'ancienne Ville de Montréal, la situation est différente. Nous bénéficions toujours d'une lettre d'entente particulière qui, grâce à l'existence d'une Banque réseau, fait encore de nous des employé-es en mesure de se déplacer à travers les 9 arrondissements qui formaient Montréal. Cette lettre d'entente aurait dû être renégociée dans les 6 mois suivant la signature de la convention en décembre 2003.Ce qui, on le constate, ne fut pas fait.

Malgré le fait que le syndicat ne semblait pas bouger, les arrondissements, eux, ne sont pas demeurés inactifs. Ainsi, une note de service d'avril 2004 faisait état d'une réunion de chefs de division où s'exprimait clairement l'intention d'abolir la Banque réseau au profit d'une gestion par arrondissement ainsi que la volonté de comptabiliser l'ancienneté par arrondissement.

Ce n'est qu'en janvier 2005 que le SFMM met sur pied un comité pour le renouvellement de notre lettre d'entente. Comme nous apprenons l'existence de ce comité par un fax qui demandent de lui faire parvenir des suggestions, des aide-bibliothécaires auxiliaires se réunissent et élaborent un certain nombre de points qui, d'après eux, pourraient améliorer leurs conditions de travail. Mais, il apparaît très vite que le soit-disant comité n'a pas vraiment l'intention d'écouter qui que ce soit pour la rédaction du nouveau projet.

Réunions, pétition, pressions finissent par avoir raison du comité. Une réunion des délégué-es et de personnes ressources, mettant au point un projet de lettre d'entente, sera finalement suivie d'une Assemblée "sectorielle" des membres pour approuver le texte élaboré. Mauvais copier-coller de la part du comité du SFMM, le projet est de nouveau reformulé pour être conforme a ce qui a été mis de l'avant au cours de la réunion précédente. Adopté à l'unanimité, le texte de lettre d'entente devra faire l'objet de deux autres réécritures pour finalement ressembler à ce qui avait été voté.

Ce projet a pour axe principal l'existence de la Banque réseau et, par conséquent, le refus du casernement en arrondissement.

Suite à la consultation du SFMM auprès de ses membres pour le renouvellement de la convention collective qui est échue,rappelons-le, depuis décembre 2006, ce besoin de briser l'enfermement semble quelque chose de généralisé. "La problématique reliée aux mouvements de personnel et notamment la mobilité de la main d'oeuvre dans l'ensemble de la Ville et non pas seulement dans les seuls arrondissements ou services" est au coeur des demandes formulées dans le projet déposé auprès de l'employeur, dixit l'Info-négo 2007, no 1.

Or voilà que, subitement, nous apprenons l'existence d'une lettre d'entente "intérimaire" (en vigueur de juin 2007 à décembre 2007) qui a pour effet de consacrer la priorité de l'arrondissement Mercier-Hochelaga-Maisonneuve sur la Banque réseau, ce qui est en contradiction flagrante avec la volonté exprimée par les aide-bibliothécaires lors de l'Assemblée "sectorielle" de juin 2005.

À quoi devons-nous nous attendre si LA MAIN DROITE NE SAIT PLUS CE QUE FAIT LA MAIN GAUCHE ?!!